Rappelons tout d’abord quelques principes.
Comment la gestion adaptative des espèces est-elle censée fonctionner ?
La gestion adaptative consiste à redéfinir cycliquement la gestion d’une espèce, ou de ses prélèvements, selon l’état de cette population et des connaissances de son fonctionnement (source : ONCFS). Cette gestion est censée s’appuyer sur l’avis d’un conseil d’experts scientifiques.
Qui sont ces experts scientifiques ?
Le gouvernement s’est appuyé, selon ses propres termes, sur « L’avis minoritaire des 6 experts désignés par la Fédération nationale des chasseurs » pour prendre sa décision. Vous avez bien lu ! Ces experts ont été retenus parce qu’ils défendent la chasse, et non pour leurs compétences propres conformément à l’arrêté constitutif.
Soit. Voici donc leurs recommandations concernant les 3 premières espèces soumises à la gestion adaptative :
- la Tourterelle des bois : mise en place temporaire de quotas de chasse à zéro,
- le Courlis cendré : aucun prélèvement sur l’ensemble du territoire national,
- Barge à queue noire : fixation d’un quota de 210 individus de la sous-espèce islandaise en novembre et décembre.
Quelles sont les décisions prises pour la prochaine saison de chasse au final ?
Malgré les recommendations du Conseil des experts (pourtant chasseurs !), le projet d’arrêté ministériel prévoyait initialement de tuer 30 000 Tourterelles de bois, une espèce d’oiseau classée « vulnérable » en France et en Europe par l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN) ! Le ministère de la Transition écologique a finalement signé un arrêté qui fixe le quota de chasse à 18.000 Tourterelles des bois pendant la saison 2019-2020, soit cinq fois moins que le nombre chassé jusqu’à présent. « Avant cet arrêté, aucun quota n’était fixé, ce qui conduisait à un prélèvement estimé à 92.000 oiseaux par an », souligne le ministère dans un communiqué.
Certes, c’est moins que l’an dernier. Mais il faut savoir que la population de Tourterelles des bois a chuté de 80% en Europe ces 40 dernières années.
La LPO a dénoncé la décision sur la Tourterelle des bois, « qui en dit long sur la persistance du lobby cynégétique en France« , selon l’ONG.
Pour le Courlis cendré, les scientifiques recommandaient un moratoire. Le ministère avait pourtant fixé un quota de 6.000 animaux pouvant être tués pendant la saison de chasse ! Le Conseil d’Etat, saisi par la Ligue de protection des oiseaux (LPO), a suspendu l’arrêté ministériel il y a quelques jours, provoquant la colère des chasseurs.
Un troisième arrêté a reconduit la suspension de la chasse à la barge à queue noire.