Le point avec les Dr P. Souchier et J. Bernard Pellet
Il est aujourd’hui admis que la *nutrition est un facteur majeur de santé publique.

Dans ce domaine, une question est particulièrement d’actualité: existe-t-il un rapport avéré entre une consommation excessive de viandes rouges et produits dérivés ( charcuteries) et l’augmentation du risque de certaines maladies, en particulier le cancer colorectal?

Des solutions nutritionnelles sont désormais proposées par les principaux organismes de santé pour adopter, au quotidien, une alimentation source de santé.

Plus de 25% de la population française en danger : et vous ?

La consommation de viandes rouges et charcuteries est en nette augmentation: en France, elle a été multipliée par 2,5 depuis 1925.
estimation de la consommation de viande par habitant en France depuis 1800. Source : Bernard Sauvant, INRA

On peut parler de consommation excessive quand la quantité dépasse les 100 grammes de viande rouge par jour et 50 grammes de charcuterie.( Par viande rouge, on entend ici le boeuf,veau, mouton,porc et chèvre.)

Selon l’Inca (Institut national du cancer), un quart de la population consomme au moins 500 g de viandes rouges par semaine : 39 % des hommes et13 % des femmes. La consommation moyenne de charcuteries est de 270 gr/semaine (38 g par jour), 330 g chez les hommes et 215 g chez les femmes. Plus d’un quart de la population consomme au moins 50 g de charcuteries par jour.

Une tranche de jambon pèse environ 50 g ; un steack haché entre 80 et 120 g.

Rappel : il s’agit ici de la viande rouge cuite. Les quantités correspondent au poids de viande consommée : 500 g de viande cuite correspondent à environ 700-750 g de viande avant cuisson.

 

Une modification du comportement alimentaire

Cette augmentation de viandes et charcuteries est due à l’élévation du niveau de vie, d’autant plus que la surabondance proposée par les circuits de grande distribution a joué en faveur de la surconsommation.

Le facteur culturel est également déterminant car l’éducation à l’alimentation et à la santé varie fortement selon les groupes sociaux et la viande représente encore un produit de prestige, ce qui explique que sa consommation soit plus élevée aujourd’hui dans les catégories sociales les plus modestes.

Les maladies de la surconsommation

Le risque principal – jugé certain aujourd’hui- est l’augmentation du cancer colorectal, 3ème cancer le plus fréquent : 37000 nouveaux cas par an. 2ème cancer en termes de mortalité devant le cancer du poumon.

Le risque est augmenté de 29% par portion supplémentaire de 100 grs de viande rouge par jour et de 21 % par portion de 50 grs de charcuterie par jour (Institut national du cancer).

La forte teneur en graisses saturées des viandes rouges et charcuteries ainsi que leur haute densité énergétique sont des facteurs aggravants des maladies cardio – vasculaires ( athérome et infarctus) , de l’obésité, du surpoids et du diabète de type II.

Etude des Adventices du 7e jour :
34 000 patients suivis pendant 6 ans.

Viande et obésité
Viande et diabète de type II
Viande rouge et cancer du côlon
Viande blanche et cancer du côlon
Viande et hypertension
Source : Fraser, G.E., Associations between diet and cancer, ischemic heart
disease, and all-cause mortality in non-Hispanic white California Seventh-day
Adventists. Am J Clin Nutr, 1999. 70(3 Suppl): p. 532S-538S.

Les charcuteries, par leur forte concentration de nitrates et de graisses saturées, favoriseraient le développement de certains cancers: estomac et pancréas.

 

La solution: « manger autrement »

 

« Manger autrement » , c’est le titre du livre publié en 1985 par le Docteur Jean-Michel LECERF qui pointait déjà les défauts de notre alimentation: trop de graisses et de protéines animales et pas assez de céréales, légumes verts , légumes secs et fruits.

Les recommandations des principaux organismes de santé : PNNS ( programme national nutrition et santé ), INCa ( institut national du cancer), FMRC ( fonds mondial de la recherche contre le cancer) vont dans ce sens car ils s’accordent à dire qu’il convient de limiter la consommation de viandes et produits dérivés et d’augmenter celle de légumes , fruits, céréales complètes et légumes secs.
Des solutions concrètes pour une alimentation-santé

Diversifier les sources de protéines animales / végétales.
Les protéines animales possèdent tous les acides aminés essentiels- c’est-à-dire ceux qui ne peuvent pas être synthétisés par l’organisme humain- contenus dans la protéine idéale de référence officielle.

Mais il faut savoir que les légumineuses (lentilles, pois, pois chiches, haricots secs,soja) possèdent une valeur qualitative comparable en protéines à celles d’origine animale, en particulier le soja. Les autres protéines végétales (légumes à feuilles, fruits oléagineux comme les noix, noisettes et amandes et céréales), bien que ne possédant pas tous les acides aminés essentiels, sont une source de protéines satisfaisante lorsqu’on les associe.

Adopter le plus possible un mode alimentaire qui a fait ses preuves: le « régime méditerranéen » dont l’observation induit une mortalité réduite de 17 % (voir en annexe: Aprifel juin -juillet 2001).
Pour corroborer le bien-fondé de ce type d’alimentation : une confirmation éclatante apportée par les centenaires d’OKINAWA ( île du Japon) : menu de la journée: 7 portions de légumes et de fruits, autant de céréales et 2 plats à base de soja. Poisson trois fois par semaine et boissons alcoolisées modérées.

 

Quelques idées reçues …

 

La viande rouge est indispensable pour être en bonne santé
Certes elle apporte de protéines d’excellente qualité mais elle n’est pas la seule source de protéines; les œufs, les légumes à feuilles, les légumineuses (entre- autres le soja) apportent autant de protéines que la viande.

La viande permet de conserver sa masse musculaire
Une consommation excessive en viandes provoque une acidose qui associe une hyper calciurie (perte de calcium urinaire) à une fonte musculaire. Les fruits et légumes, parce qu’ils sont riches en sels organiques de potassium, sont favorables à la préservation de la masse musculaire (Actualités scientifiques; Aprifel juin 2008).
L’élevage intensif, un réel danger sanitaire ?

Dans ce type d’élevage , la promiscuité ne peut qu’accroître le risque de contamination entre les animaux. Souvent cette situation provoque une augmentation de la consommation d’antibiotiques et de désinfectants pour pallier une hygiène déficiente et un environnement non-respectueux du bien-être de l’animal (voir ci-dessous Loi du 10/07/76). Ces antibiotiques ont même été administrés parfois comme facteur de croissance afin d’obtenir une meilleure productivité. Au conseil de L’Europe ( le 1/12/99), la commission de l’agriculture et du développement rural a rédigé certaines recommandations visant à :

– interdire l’utilisation d’antibiotiques comme promoteurs de croissance.

– limiter au maximum l’utilisation de certains antibiotiques.

– améliorer les contrôles sanitaires dans les élevages.

Mais il est certain qu’il reste obligatoirement , même après abattage, des traces d’antibiotiques et d’ autres produits . Tous ont vraisemblablement une action de sensibilisation chez l’homme qui, par des contacts répétés à des doses si infimes soient-elles, peut développer soit des résistances , soit des allergies aux produits utilisés chez l’animal.

L’élevage intensif provoque également la prolifération des mouches capables de se reproduire très rapidement. Or toutes ces mouches sont le vecteur de nombreuses bactéries et maladies ( salmonelles ; variole ; mastite ; colibacillose ; coryza…) qui se transmettent rapidement aux animaux d’élevage dont le système immunitaire est amoindri par un environnement défavorable. Il est avéré que de nombreuses maladies sont transmises de l’animal à l’homme ( brucellose ; tuberculose ; leptospirose ; toxoplasmose et , plus récemment, la maladie de Creutzfeldt- Jacob, la grippe aviaire….) Un cas particulier très révélateur : dans les élevages porcins intensifs, les risques encourus par la dissémination de micro-organismes responsables de maladies sont fortement accrus lors des déplacements d’animaux. Ce risque est encore augmenté lorsque les approvisionnements sont multiples ( animaux provenant de plusieurs élevages).

N’oublions pas que les premiers exposés à ces infections sont les éleveurs qui , inhalant les émanations gazeuses et aéroportées dues aux déjections et aux lisiers , développent des problèmes respiratoires préoccupants ( bronchites chroniques par exemple).

SOURCES : Novartis ( programme anti-mouches) Conseil de l’Europe ; commission de l’agriculture et du développement rural ( web.archive.org) Réglementation française- loi du 10 juillet 1976, article 9- : « tout animal étant un être sensible doit être placé par son propriétaire dans des conditions compatibles avec les impératifs biologiques de l’ espèce » Etude INRA sur le bien-être animal.
Pour en savoir plus…
Mangerbouger.fr/ PNNS / manger mieux c’est possible.

www.e-cancer.fr/ nutrition et cancers

www.FMRC.fr / rapport du centre international de recherche sur le cancer « causes du cancer en France »

www.aprifel.com/ équation nutrition

Manger autrement Dr Jean-Michel LECERF éditions institut Pasteur de Lille

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