Un taux de survie en forte baisse
Un article récent co-signé par trois scientifiques du CNRS et de l’OFB (1) montre que le taux de survie annuelle des loups est passé de 71% pendant la période 2014-2018 à 62% depuis 2019. Cela signifie qu’un loup n’a que 62% de chances d’être encore vivant un an plus tard, et qu’ainsi son espérance de vie après avoir passé l’âge de 6 ans est extrêmement faible.
Des quotas de tirs relevés et un braconnage massif
Cela est dû au relèvement du plafond de loups pouvant être tirés à titre dérogatoire, qui est passé en 2019 de 10% à 19% de la population estimée de loups en France, après une étape à 17% (2). Mais aussi à un niveau de braconnage très important, qui a été mis en lumière, entre autres, par un groupe de naturalistes constitué en « Groupe Loup PPAlpes ». Ce groupe, composé d’une quarantaine de naturalistes suivant 38 meutes dans les Alpes, Préalpes et massifs provençaux français, conclut dans son dernier rapport (3), après une analyse fouillée, qu’il y a « probablement 150 à 200 loups tués, chaque année par braconnage en France ». Ce qui porte le nombre total de loups potentiellement détruits en 2025, officiellement ou par braconnage, dans un intervalle situé entre 342 et 392 individus, pour une population estimée à 1013, étant donné que cette année le plafond de loups pouvant être tués a été porté à 192 (4).
L’importance de la qualité des estimations
Cela nous renvoie à l’importance de la qualité d’estimation de loups effectuée par le réseau loup-lynx animé par l’Office Français de la Biodiversité (5), dont les résultats et méthode ont subi maintes fois les critiques des fédérations de chasse, ainsi que des syndicats d’élevage (6).
L’article mentionné en introduction rappelle que c’est toujours la méthode « capture-recapture » (mais pas celle du loup !) qui est utilisée, en s’appuyant essentiellement sur la collecte d’indices de présence sur l’ensemble du territoire. C’est un calcul statistique de probabilité de détection des individus, développé dans l’article, qui permet de conduire à un intervalle de confiance, ici entre 920 et 1125 individus. Même s’il peut paraître large, cet intervalle s’est considérablement réduit grâce à l’adoption d’un maillage de recherche de 10 km sur 10 km sur toute l’aire de répartition du loup, et en fixant des objectifs chiffrés définissant le nombre d’indices à trouver, dans chaque maille.
Une conservation en trompe-l’œil
A la lumière du nombre de loups qui seront probablement tués cette année (légalement ou pas), et après le constat de stagnation de la population de loups depuis 3 ans (aux incertitudes près), de leur quasi-maintien à l’est du Rhône et sur les massifs montagneux, on ne peut que s’étonner de la constance qu’a l’État à prétendre que les loups sont en France dans un état de conservation tellement favorable (7) que l’on peut continuer à les tuer à hauteur de 19% à 21% de leur population ! Et cela risque de s’aggraver encore à la suite des nouvelles dispositions qui vont résulter de la déclassification de protection du loup au niveau européen.
Références
(1) Cyril Milleret, Christophe Duchamp, Olivier Gimenez. Mise à jour des estimations
démographiques et des effectifs de la population de loups en France lors de l’hiver
2023/2024. CNRS; OFB. 2025. hal-05016361(https://hal.science/hal-05016361v1/file/rapport-suivi-de%CC%81mographique-et-effectifs-loups-2023-24.pdf)
(2) https://www.legifrance.gouv.fr/jorf/id/JORFTEXT000038827469
(3) https://drive.google.com/file/d/1M-hviOtahhhc2uenZno__wOj5BL3-29b/view
(4) https://www.legifrance.gouv.fr/jorf/id/JORFTEXT000050730647
(5) https://professionnels.ofb.fr/fr/reseau-loup-lynx
(6) https://www.animal-cross.org/des-fonds-dedies-au-suivi-biologique-des-loups-detournes-dans-le-but-de-les-tuer/
(7) C’est ce que l’on peut lire dans tous les mémoires en réplique de l’Etat lors de nos recours contentieux

